Le rôle d'orateurice à RA se conçoit comme un véritable artisanat : un même modèle pour une touche unique à chaque fois. Voici quelques conseils et recommandations.
Recommandations et conseils pour le rôle d'orateurice
Sur la préparation au rôle d'orateurice
Adaptez le script à votre sauce : Reformuler autant que vous voulez, changez des phrases, sautez certaines sous-parties, mais attention à ne pas trop lisser votre propos et à garder la structure générale.
Notamment en créant votre petite histoire personnelle : donnez une histoire humaine que les gens peuvent visualiser - les gens se rappellent mieux de quelqu’un avec une histoire personnelle visuelle
Exemples :
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“j’étais agriculteur et je cultivais mes carottes mais je me suis rendu compte que personne allait résoudre le problème à ma place”
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“je faisais de la chasse tous les week-ends mais j’ai pris conscience de ce qui se passait. Si un mec qui était aussi à droite que moi peut le faire alors, n’importe qui peut le faire”
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“j’étais un chercheur en biologie mais je me suis rendu compte que ça allait pas suffire de passer mes journées dans un bureau assis derrière un ordinateur”
Apprenez ensuite votre script par cœur: comme une pièce, pour que ça sonne sincère/spontané, que vous puissiez le faire sans note, de façon fluide mais que le contenu reste précis.
Initier - ou suivre - en coopération avec son réf Formation/ Intégration EL de ta ville un groupe d’entraînement au rôle d'orateurice pour s’y préparer au mieux et dans le fun : se réunir pour discuter du fond du script, s’entraîner à donner le script à l’oral devant les autres, faire des feedbacks, ou commencer par se filmer et partager sa vidéo avec une personne de confiance ou avec le groupe
Il est essentiel que les orateurices aient une certaine compréhension de la stratégie générale, du rôle qu’y tient la mobilisation et de la structure de mobilisation (voir les parties correspondantes de cette formation moodle)
Prendre soin de son état d’esprit. Lorsque vous donnez cette conférence, vous offrez votre vérité la plus profonde, vous passez à d’autres ce qui compte pour vous, vous réveillez votre auditoire du sommeil du déni léger vers une compréhension viscérale de l’immense souffrance, déjà en cours dans le Sud Global, et qui engloutira toute l’humanité avec elle si nous ne forçons pas une réponse des gouvernements à travers le monde.
Donc les gens doivent savoir à quel point cela vous tient à cœur, ils doivent sentir que vous parlez avec votre voix authentique: votre confiance et votre passion sont vitales. Donc apprenez le script par cœur et pratiquez, pratiquez, pratiquez afin que vous puissiez le faire votre en le personnalisant. Et n’hésitez pas à prendre un temps avant une réunion publique pour vous connecter à des évènements et des émotions qui vous traversent en lien avec ce sujet (appréciation, gratitude, tristesse, colère etc) - l’après midi que vous avez passé avec votre nièce de 7 ans dimanche dernier, un reportage que vous avez vu sur les victimes des inondations au Pakistan, l’allégresse que vous avez ressenti d’assister à un concert dans un pays en paix etc.
Nous ne sommes pas des conférenciers, et DR n’est pas une association de sensibilisation les gens. Vous êtes là pour placer des humains face à la réalité, mais surtout face à eux même, à leurs valeurs, à leurs doutes, à leurs craintes, à l’amour qu’ils éprouvent pour ce qui leur est cher, avec l’espoir que cela réveille en eux la flamme de la révolte et les fasse passer à l’action.
Comment apprendre un script ?
Il y a beaucoup d’approches à ça, essayez les toutes jusqu’à ce que ça soit rentré.
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Prenez ça au sérieux - ça vous prendra entre 8 et 16h
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Lisez tout le script pour comprendre comment la structure générale se tient.
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Observez autant que possible d’autres speakers plus expérimentés donner la conférence et prenez des notes. Il est essentiel pour la formation des orateurices de s’engager à donner et recevoir des feedbacks vraiment réfléchis, constructifs et aidants. Prendre des notes peut nous aider à mieux comprendre la conférence et à faire des feedbacks aux orateurices.
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Lisez le script à nouveau, en l’adaptant à votre sauce avec vos propres mots et en élaborant les ⅔ histoires personnelles correspondant aux différentes parties du script.
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Allez lire les sources utilisées dans la conférence (cf. partie 2)
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En utilisant vos notes, scinder la conférence en courtes sections, ie une page ou un bullet point à la fois, et apprenez cette section en la lisant encore et encore et prenant des notes très concises à côté pour que quelques mots puissent vous rappeler l’entièreté de la section. Plus vous le scindez en petits bouts, mieux c’est.
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Répétez cette section devant un miroir jusqu’à ce que vous l’ayez mémorisée et chronométrez vous pour vous assurer que votre timing est bon.
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Répétez la section suivante , et la suivante etc jusqu’à ce que vous ayez la moitié de la conférence de mémorisée, et que vous puissiez la donner d’une façon puissante, avec votre petite histoire personnelle (une petite histoire de 30 secondes qui vous situe dans la grande histoire que vous racontez d’une façon qui crée une image vivide et mémorable pour les gens)
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Enregistrez-vous donner cette moitié de conférence et faites vous des notes de feedback pour vous-même à mesure que vous vous regardez la donner.
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Donnez cette section mémorisée de la conférence à un proche en qui vous faites confiance et avec qui vous vous sentez à l’aise. Faites lui vous poser des questions comme un vrai membre du public à la fin. Demandez-lui des retours constructifs (aiguillez le sur le type de retour que vous voulez, ie là où il s’est senti le plus émotionnellement engagé dans la conférence, les parties qui ressortent le plus pour lui etc.). Cela peut être un membre de la campagne ou pas.
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Faites enregistrer votre conférence, ensuite regardez là, et prenez des notes pour un auto-feedback. (vous pouvez le faire en deux fois si vous préférez, une partie puis la seconde)
Sur le déroulé de la conférence
Intro : obtenez de l’hôte qu’iel vous introduise en commençant par partager quelque chose que vous avez en commun
Embarquez votre public : posez leur des questions auxquelles ils pourront répondre par la positive - hochez de la tête pour encourager ça (ie quand vous leur demandez s’ils sont prêt à regarder la réalité en face ensemble par exemple)
Récurrence et répétition : choisissez 3 faits que vous considérez comme majeurs et ensuite référez-y vous encore et encore. Les gens ont besoin d’entendre quelque chose au moins 3 fois pour s’en rappeler. Potentiellement plus. Répétez certains éléments de différentes façons, ie: “vous avez entendu ce que je viens de vous dire ? 2 à 3 ans !” - “On se retrouve mercredi prochain à tel endroit à tel heure”
Évitez les questions réponse : les Q&R c’est l’enfer, surtout en plein milieu d’un propos chargé émotionnellement. Pour ça on explique bien aux gens qu’on va leur parler, ensuite qu’on va faire des groupes où chacun.e pourra s’exprimer, et si il y a encore des questions en suspens à ce moment-là alors on pourra rester à la fin pour y répondre. Maintenez cette discipline et si quelqu’un insiste pour poser une question (souvent des hommes de plus de 50 ans) rappelez leur ce que vous avez dit au début → “je répondrai à vos questions dans les groupes de parole ou je peux les prendre à la fin, c’est vraiment important que tout le monde ait le temps de s’exprimer.”
Gérez bien votre temps : Veiller à ne durer trop longtemps. S'adapter au contexte du public, notamment en fonction de sa taille. Si peu nombreux, éviter un exposé magistral trop long.
La confiance est clé : Une des façons qu’on a de savoir qu’un.e intervenant croit en ce qu’il dit, c’est quand ils sont détendus dans leur discours, alors rendez le conversationnel - posez des questions à l’audience, variez le ton, le volume, le rythme etc. On voit ça juste après !
Sur la posture
Nota bene : si le nombre de participants à la RP est inférieur à 4 personnes, invitation à ne pas donner une RP sur un mode magistral, mais plutôt quelque chose de plus informel, convivial et horizontal. S’asseoir autour d’une table et accepter les questions pendant l’exposé de l'orateurice peuvent être des solutions pour ne pas apparaître en déphasage avec les participants.
De manière générale : Un degré de plus est atteint quand la personne qui parle montre ses émotions en étant certain.e de leur légitimité. Si vous sentez que l'émotion monte, essayez de ne pas la bloquer et de continuer à dérouler vos propos, de laisser vos émotions les nourrir. On n'est pas habitué.e.s à pleurer ou s'énerver en public, mais ici ça peut avoir beaucoup de sens de faire part de sa vulnérabilité, ça envoie le message qu'on peut être déterminé.e, convaincant.e et ému.e en même temps, être profondément touché.e sans se noyer. Bref, ça dit : laissez-vous émouvoir, ça ne vous rendra pas faibles, au contraire.
Contact visuel : essayez de maintenir un contact visuel avec l’audience si possible. Au début, pour gagner en confiance, vous pouvez vous concentrer sur les membres du public les plus enthousiastes.
Volume : assurez vous que tout le monde peut vous entendre et ensuite variez au cours de la conférence. Ça peut faire partie de comment vous construisez un voyage émotionnel tout du long.
Rythme : Les moments de pause et de silence sont hyper hyper importants, pour laisser aux gens le temps de processer ce que vous dites, pour attirer leur attention et pour donner plus de gravité à vos propos. Expérimentez avec ça. Par exemple, Arrêtez vous au milieu d’une phrase, faites une pause et reprenez pour augmenter l’effet dramatique.
Ton : expérimentez et trouvez ce qui est juste pour vous et qui permet de construire un effet dramatique. Montez en intensité quand nécessaire, quitte à vous emporter un peu.
Utilisez un langage de proximité : utilisez un langage familier, de la vie de tous les jours.
Humour : c’est très recommandé et ça peut aider à conquérir un public, mais ça doit être manié avec précaution compte tenu du sujet.
Humilité & proximité : je suis une personne ordinaire comme vous et je vous partage juste ce que nous dit la science et l’histoire. NOUS sommes l’audience, nous sommes des gens ordinaires comme eux, donc faites 1 aveu - “on est là ensemble pour regarder la réalité en face pas vrai ?”
Posture : soyez détendus, mais tenez vous droit et fièrement ! Surtout pas recroquevillés sur vous-même ou les mains dans les poches.
Respiration : respirer depuis le diaphragme aide à se détendre, à respirer profondément lorsque l’on est nerveux et que l’on respire de façon superficielle.
Debout ou assis ? : en général on parle mieux, on est plus animé, on respire mieux etc lorsque l’on est debout. Cependant, le choix peut dépendre de la taille du groupe et de vos préférences personnelles. Lorsqu’il y a, disons, moins de 6 personnes dans une pièce, ça peut être intéressant de s’asseoir pour mieux connecter avec les gens.